Dans une démocratie fondée sur l’État de droit, le juge administratif demeure le garant ultime des libertés publiques, du respect de la hiérarchie des normes, et de la légalité des actes pris par les autorités locales. Face à l’essor du DOOH (Digital Out Of Home), média numérique urbain en pleine expansion, certains élus, à défaut d’obtenir par voie parlementaire les restrictions qu’ils souhaiteraient imposer, tentent aujourd’hui de contourner le débat démocratique. Ils recourent à un outil réglementaire : les Règlements Locaux de Publicité (RLP), qu’ils rédigent parfois avec un zèle liberticide, au mépris des évolutions technologiques, des intérêts publics majeurs, et des principes fondamentaux de notre République.
Un contournement de la loi par excès de réglementation locale
Des élus comme Delphine Batho ou Matthieu Orphelin et plus récemment le LFiste Arnaud Saint-Martin, fervents défenseurs de restrictions drastiques à la publicité extérieure, n’ont pas réussi à faire adopter leurs propositions visant à interdire l’affichage numérique au niveau national. Faute de majorité législative, ils instrumentalisent les RLP pour imposer localement des restrictions souvent disproportionnées, ciblant de manière manifeste les écrans numériques, jusqu’à en interdire toute forme d’évolution ou d’implantation. Cette pratique pose une question démocratique essentielle : un règlement local peut-il annuler dans les faits une politique nationale de transition numérique soutenue par l’État ?
L’innovation sacrifiée au nom d’un cadre de vie mal compris
En ignorant volontairement les avancées technologiques les rédacteurs de certains RLP freinent non seulement l’innovation mais aussi les efforts en matière de développement durable. Les nouveaux écrans peuvent être équipés de panneaux solaires, solution encouragée par le gouvernement via France Relance, de capteurs environnementaux (CO₂, qualité de l’air), de dispositifs d’économie d’énergie, et offrir une solution de mutualisation publicitaire, réduisant le nombre de dispositifs en entrée de ville.
Limiter drastiquement la taille de ces écrans à 1,5 m² revient à empêcher toute intégration de ces technologies. Où installer des panneaux photovoltaïques sur un écran de la taille d’une tablette tactile ? Où placer des capteurs climatiques utiles à la collectivité ? Ces choix réglementaires rétrogrades sont en contradiction totale avec les engagements de la France dans la lutte contre le dérèglement climatique, notamment ceux pris lors de la COP21.
Un média au service du public et de la solidarité
Les écrans DOOH ne sont pas de simples supports commerciaux. Ils jouent un rôle de média citoyen de proximité, avec des fonctions essentielles : diffusion d’alertes (ex. Alerte Enlèvement), affichage d’informations en temps réel (météo, horaires de marée, trafic, messages de sécurité civile), soutien aux campagnes d’intérêt général (Banque Alimentaire, Restos du Cœur, campagnes sanitaires) et valorisation du tissu associatif et commerçant local.
Ce rôle d’utilité publique, conforme aux valeurs de liberté, égalité, fraternité, est trop souvent ignoré par les rédacteurs de RLP. Il constitue pourtant une réponse moderne aux besoins d’information locale dans un monde de plus en plus connecté, en renforçant le lien social, la solidarité et la citoyenneté active.
Une distorsion de concurrence et une vision franco-française dépassée
La France s’isole en adoptant des réglementations locales restrictives bien plus sévères que dans d’autres pays européens. En Allemagne, aux Pays-Bas ou en Espagne, des écrans de 25 m² sont autorisés et intégrés aux paysages urbains, sans pour autant nuire à la qualité de vie. Cette sur-règlementation française crée une distorsion de concurrence préjudiciable pour les acteurs nationaux du numérique, freinant les investissements, l’innovation, et la création d’emplois.
Pire encore, elle renforce les positions dominantes d’autres médias moins régulés ou moins responsables sur le plan environnemental.
Le recours ultime : le juge administratif, rempart contre les abus
Face à des RLP qui ne visent plus la préservation équilibrée du cadre de vie mais l’élimination systématique d’un secteur innovant, notre seul bouclier reste le juge. C’est à lui qu’il revient de censurer les règlements manifestement discriminatoires, disproportionnés, ou contraires aux principes constitutionnels, notamment la liberté d’entreprendre, le droit à l’information et le principe d’égalité devant la loi.
Les professionnels du DOOH ne demandent pas un blanc-seing, mais un traitement équitable et une reconnaissance du rôle structurant que peut jouer leur média dans la société de demain. Refuser d’envisager des formats adaptés, de soutenir la mutualisation, de permettre la transition énergétique des dispositifs, revient à saboter une dynamique vertueuse pour le pays tout entier, et le secteur de la publicité en particulier.
Conclusion : préserver l’État de droit, défendre l’innovation
En tentant de restreindre, voire d’éteindre les écrans numériques par le biais de RLP ultra-restrictifs, certains élus contournent le débat législatif et entravent les innovations écologiques et sociales. Cet acharnement est indigne d’une République. Et c’est la raison pour laquelle nous avons toute confiance en la Justice de notre pays pour garantir cette équité face à la loi, pour protéger l’intérêt général, et pour que le règle commune ne devienne pas un instrument idéologique de punition, mais bien un instrument de protection du cadre de vie, comme de notre support local d’expression.
Ne tuons pas un média d’avenir. Défendons un DOOH au service de l’intérêt collectif, de l’environnement, de la solidarité, et de l’innovation citoyenne.