Selon une étude de l’institut IFO basée sur l’étude des administrations de 184 pays, une réduction importante des charges bureaucratiques et administratives pourrait générer une augmentation moyenne de 4,6 % du PIB réel. C’est 100 milliards d’euros pour la France. Rien que pour le secteur de la publicité numérique, le manque à gagner est estimé à entre 40 et 63 millions d’euros.
44,1 millions. C’est le nombre de mots qu’il y a dans les codes de loi en France. En augmentation de 50% sur 20 ans ! Chaque ligne, chaque alinéa, est une norme de plus à contrôler pour nos administrations, et un poids qui repose autant sur l’Etat et l’ensemble des collectivités, que sur les entreprises qui en font les frais.
Si la simplification est évoquée de manière permanente par toutes les majorités politiques, force est de constater qu’aucune ne l’a réellement mise en place. Et notre secteur d’activité, celui de la publicité numérique, en est le parfait exemple.
Tout d’abord, il y a la règlementation nationale, qui porte des règles strictes en termes de densité (la publicité est limitée en nombre par unité foncière) et de format (8m2 maximum pour la publicité numérique). Cela n’est pas mauvais en soi, mais tout se complique avec ce que l’on appelle le « régime d’autorisation ». C’est-à-dire que là où la publicité papier se contente de faire une simple déclaration pour l’installation d’un dispositif, la publicité numérique doit demander l’autorisation systématique des communes dans lesquelles elle veut s’implanter. Autant de fonctionnaires nécessaires pour contrôler ces demandes, et de temps perdu pour les sociétés de la publicité numérique, qui doivent attendre deux mois pour obtenir une réponse, positive ou négative, puis deux mois encore que la commune ne revienne pas sur l’accord qu’elle a précédemment donné.
Pire, parfois, certains refus sont injustifiés en droit. Par exemple, une commune qui interdit l’installation d’un dispositif numérique sur la base d’un règlement local de publicité qui n’a pas encore été voté. Alors, les sociétés de la publicité numérique sont contraintes d’aller contester le refus en justice, avec tous les frais que cela engage, non seulement pour les entreprises et la collectivité, mais aussi pour le système judiciaire. Une usine à gaz qui coûte très cher. Le manque à gagner avec ces refus injustifiés et le temps perdu, les coûts en frais d’avocat et pour la justice, ainsi qu’en fonctionnaires administratifs nécessaires pour la gestion et le contrôle de ce système d’autorisation, est ainsi estimé à entre 3 et 6 millions d’euros par an, répartis entre l’Etat, les collectivités et les sociétés de la publicité numérique.
Ensuite, il y a les règlementations locales. Les fameux RLP (règlements locaux de publicité) que chaque commune ou intercommunalité peut élaborer pour son territoire. Ces RLP, dont certains sont fabriqués par des cabinets de conseils ou bureaux d’études qui n’hésitent pas à gonfler les factures (250 000 euros pour le RLPi de Rouen et 200 000 euros pour celui de Metz…) coûtent cher aux collectivités qui doivent les élaborer, et en procédures. Avec une moyenne d’environ 50 000 euros pour fabriquer un RLP, en prenant en compte le coût des bureaux d’études et des fonctionnaires chargés du dossier, et une moyenne de 25 RLP par an sur les 5 dernières années (estimation basse), on peut estimer le coût des RLP pour les communes et métropoles à 1,25M€/an. L’Etat distribue de plus, 200 000 euros par an pour inciter les communes à élaborer des RLP.
A cela, ajoutons le fait qu’un règlement local de publicité fait baisser le nombre et la surface des publicités sur un territoire, les communes récoltent également moins de taxes. La TLPE (taxe locale sur la publicité extérieure) n’a ainsi rapporté que 148 millions d’euros pour 2000 communes, dont moins de 2 millions pour la publicité numérique. Sans le poids des RLP, cela pourrait représenter le double (estimation basse) voire le triple (estimation haute). Donc entre 2 et 4 millions de plus de manque à gagner pour les collectivités.
De surcroît, l’instabilité que génèrent ces RLP pour notre profession limitent drastiquement nos perspectives de croissance, en plus d’obliger les acteurs du secteur à de nombreux investissements rapides lorsqu’il y a un nouveau RLP, soit 2 ans pour se mettre en conformité des zonages et des formats. Cela oblige à acheter de nouveaux mobiliers, à mobiliser des équipes techniques pour déplacer et changer les panneaux… Certaines entreprises du secteur, comme certaines sociétés locales de Besançon, n’y survivent pas et doivent fermer leur entreprise. Ajoutons à cela les coûts pour les conseils juridiques, ou l’administratif pour remplir les CERFA, et faire les allers-retours avec les collectivités pour contrôler que chaque règle est bien respectée, créent une lourdeur insupportable pour l’ensemble des sociétés, estimée par le SNPN à entre 10 et 12 millions d’euros par an, dont entre 2 millions et 3 millions d’euros par an pour les collectivités.
Certains RLP qui visent particulièrement la publicité numérique en l’interdisant complètement, ou en limitant son format à 2m2 (tuant son modèle économique en l’empêchant d’accéder au marché du grand format), détruisent aussi intégralement l’emploi et le chiffre d’affaires des sociétés de la publicité numérique qui exercent sur leur territoire.
C’est le cas du RLPi de Brest qui a supprimé 90% du chiffre d’affaires de la publicité numérique sur la métropole brestoise, en obligeant les sociétés exploitantes à retirer tous leurs panneaux. Ce qui a eu pour conséquence évidente la suppression de tous les emplois directs qui y étaient liés. Simplement, pour une histoire de règlement !
Le manque à gagner, les limitations des perspectives de développement et les destructions d’un modèle économique via les RLP sont ainsi estimés pour l’ensemble du secteur à entre 10 et 20 millions d’euros par an, et environ la moitié de ce chiffre pour l’Etat et les collectivités qui se privent d’emplois locaux et donc de personnes qui pourraient sortir du chômage et créer de la croissance sur leur territoire.
De plus, comme pour les autorisations, lorsque des RLP excessifs et liberticides sont contestés devant les tribunaux, cela engage des frais judiciaires pour les collectivités, les sociétés de la publicité numérique, et mobilise le temps de notre justice qui serait sans doute mieux utilisé dans d’autres affaires, si ces règlements étaient plus simples et équilibrés.
Ajoutons à cela les conséquences pour les entreprises locales, qui ne peuvent plus communiquer sur les écrans, ce qui redirige donc mécaniquement le consommateur sur les GAFAM, qui ne créent pas d’emploi en France et qui n’y payent pas non plus d’impôts. Des millions (difficiles à estimer, l’estimation la plus basse étant à 5 millions pour l’Etat et 5 millions pour les territoires) partis en fumée, et des conséquences tragiques pour l’emploi local.
On voit donc bien que la facture est salée. Un manque à gagner qui pèse entre 14 et 20 millions d’euros pour les collectivités, entre 9 et 12 millions d’euros pour l’Etat, et entre 17 et 31 millions d’euros pour les sociétés de la publicité numérique ! Autant d’emploi et de croissance disparue de notre pays dans les méandres de l’administration, alors que nos dépenses publiques sont aujourd’hui à l’euro près !
Entre 40 et 63 millions d’euros par an ! C’est cela, le coût de l’administration excessive et de l’absence de simplification du cadre de la publicité numérique ! C’est l’équivalent de 1000 emplois !
On arrête quand de se tirer une balle dans le pied ?